La France est en crise. On l’a tant entendu, dit et répété, que l’on a fini par ne plus très bien savoir quel était le sens de cette affirmation. La dette explose, se souvient-on, les déficits ne sont absolument pas maîtrisés, nous assène-t-on. Ces éléments, très importants et graves au demeurant, qui les ressent au chaque jour ?

La crise se situe-t-elle si loin au dessus de nos vies quotidiennes ? Evidemment, non. En tous cas, pas seulement.

Notre pays est en crise car il est en manque d’idées, de créativité, d’audace et d’envie. En conséquence, une génération entière –ma génération, notre génération- fait son entrée dans la société active sans que personne n’ait pensé à lui faire de place.

Excédée et étouffée, une grande partie de cette génération a fait le choix du départ. Ayant moi-même vécu l’expérience de l’expatriation, j’ai été le témoin de l’arrivée toujours plus importante de bataillons de jeunes français animés avant tout par l’envie de « se bouger » dans les rues de Londres et Berlin. Et combien sont-ils à chaque année à s’en aller ailleurs, et surtout plus loin ? Il arrive, plus souvent qu’on ne le dit, que la déception soit au rendez-vous. N’y voyons pas de motif de réjouissance : de nombreux jeunes préfèrent simplement échouer ailleurs à attendre ici.

Attendre, c’est bien là l’adversaire.

Partir n’est pas le résultat du désamour, mais bien de l’impatience. Qu’attendre d’autre d’une génération qui peut presque tout faire de manière instantanée? En 1968, certains ont voulu changer la France à coup de pavés. Quarante-cinq ans plus tard, la jeunesse qui bouge ne le fait plus au nom d’une idéologie, et ses armes ont donc changées : c’est l’envie d’entreprendre qui nous permettra de dessiner la société que nous souhaitons. En fondant nos entreprises, nous créerons nos emplois mais surtout nos métiers, adaptés à nos formations et nos parcours originaux, et à nos compétences qui ne correspondent pas toujours aux cases des recruteurs. Nous élaborons aussi des nouveaux modes de management plus adaptés à notre manière de communiquer, d’interagir et de travailler.

Attention à ne pas nous sous-estimer : on n’entreprend pas uniquement dans les incubateurs et pépinières d’entreprises. L’enseignement (supérieur dans un premier temps) va être complètement redéfini par la numérisation qu’il a entamée et par des outils comme les MOOCs (Massive Online Open Courses). L’action sociale, solidaire et humanitaire n’échappera pas non plus à cette grande vague. Nous n’attendons pas de la puissance publique qu’elle règle tous les problèmes que nous voulons voir résolus : nous les prenons à bras le corps, à coups de communication de crowdfunding, et en n’hésitant à rédiger un business plan. L’entrepreneuriat n’est pas pour nous un métier, une vocation ou un état esprit : c’est notre marque de fabrique.

En Avril dernier, plus de 150 étudiants se sont réunis à EMLYON pour le Junior World Entrepreneurship Forum – France. Certains d’entre eux étaient porteurs de projets d’entreprises ingénieux, d’autres ont cherché des manières de rendre une association humanitaire plus efficace, d’autres encore ont réfléchi à la manière d’intégrer le risque et l’incertitude dans la gouvernance des entreprises. Tous étaient animés par la même certitude : c’est à nous qu’il revient de créer l’avenir. C’est notre devoir d’être entreprenants.

Il paraît que l’homme se distingue des autres espèces par son utilisation d’outils complexes pour arriver à ses fins. Notre génération se distinguera des autres en faisant de l’entrepreneuriat son outil.

Auteur >> Samuel Laufer - Junior World Entrepreneurship Forum (jwef.fr)

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